Leonard Lord (1896-1967)

20/04/2010

Parmi les hommes qui ont compté dans la genèse de la Mini, l’un d’entre eux mérite que l’on s’intéresse à son parcours plus que d’autres. Il s’agit de Léonard Lord.

Loin d’être un homme de l’ombre et en vrai capitaine d’industrie, il a su insuffler une dynamique indéniable à la British Motor Corporation, dont la taille ne la prédisposait pas à un tel succès commercial.

Leonard Lord, en tant que directeur de BMC, a exercé un pouvoir sans partage dans son entreprise.

Réputé pour son austérité et son horreur du gaspillage, c’est lui qui donne l’ordre à Issigonis en 1957 de construire une petite automobile “comme une grande”.

Leonard Lord est né en 1896. Il reçoit une éducation stricte à la célèbre école de Bablake à Coventry, parfait ses études d’ingénieur dans une usine de tissus, puis de 1914 à 1918 rejoint une usine d’armement à Coventry. Après la guerre, il effectue un passage dans l’usine de fabrication de moteurs Daimler.

En 1920, Morris Motors conclue un accord avec Hotchkiss pour la fabrication de moteurs.

En effet, craignant que les Allemands ne se saisissent de son appareil de production, Hotchkiss s’était implanté en Angleterre pendant la première guerre mondiale.

En 1922,  Lord rejoint la filiale implantée à Coventry du constructeur Français Hotchkiss. II y fera ses “armes” à défaut d’être sur les champs de bataille.

En 1923 il est débauché par Morris Motors où sa nouvelle position lui permettra de développer ses talents d’organisateur, en améliorant et rationalisant efficacement tous les stades du processus de production.

Wolseley est rachetée en 1927 par Morris et Lord y est transféré afin de moderniser l’outil de production, ce qu’il fait avec un certain succès.
A la suite de quoi, Lord est promu Directeur Général, en 1932, de l’usine de Cowley près d’Oxford. Les caractères très “entiers” de William Morris et Leonard Lord n’étaient pas faits pour s’entendre. Bien que souhaitant laisser beaucoup d’autonomie à Lord, Morris ne pouvait s’empêcher d’intervenir dans chacune de ses décisions. Au grand dépit de Lord qui ne le supportait pas.

1933 : William Morris avec le sourire aux côtés de Léonard Lord, moins euphorique !

Lord est à la barre du groupe et Alec Issigonis rejoint Morris Motors à Cowley en 1936. Il n’apprécie guère les méthodes de partage de responsabilités appliquées par Lord, dont le style de management est largement inspiré par l’Américain General Motors (Il semblerait qu’Alec Issigonis avait une affiche General Motors “bien placée” dans ses toilettes !).

Las des altercations sans fin et parfois violentes avec William Morris, Leonard Lord quitte l’entreprise pour aller travailler chez son pire concurrent en 1938… Austin !

Très amère, il fait alors la promesse de démanteler l’empire Nuffield, ce qu’il parviendra à faire quelques années plus tard.

A cette époque, Herbert Austin recherchait quelqu’un pour diriger son entreprise. Son fils unique avait été tué pendant la première guerre mondiale et son personnel le plus proche commençait à prendre de l’age. A la surprise générale, ce fût Leonard Lord qui fut choisi pour diriger l’entreprise.

Avec la seconde guerre mondiale, Lord à la tête d’Austin, converti la production civile vers une production militaire et notamment la construction d’ambulances et de véhicules gouvernementaux.

Herbert Austin décède à l’age de 75 ans,  en 1941, époque à laquelle Leonard Lord a déjà grandement marqué son empreinte en modernisant l’entreprise.

Avec la fin de la guerre Lord, alors Président d’Austin Motorcar Company, décide d’investir £1.000.000 dans les infrastructures de production du groupe afin de répondre à une probable reprise de la consommation “civile”.

Cependant, la Grande Bretagne de l’après guerre est exsangue et les queues devant les magasins d’alimentation continueront encore quelques années.

Le rationnement des produits énergétiques et les taxes exorbitantes sur les véhicules automobiles sont loin de favoriser une reprise des ventes de véhicules civiles. En gestionnaire prévoyant, Lord décide dès 1945 de construire une automobile pour l’exportation, ce qui concourra largement à assurer la survie d’Austin.

Austin A40

Les USA représentent alors le plus gros marché extérieur de l’époque. Austin y exportera l’Austin A 40 dès 1947. Celle-ci ressemblait beaucoup à des modèles de la General Motors de la fin des années trentes !

Avec 75% de la production de l’usine de Longbridge exportée vers les USA, le Canada et l’Australie, le pari était gagné et les actionnaires n’eurent pas à se plaindre !

Dick Burzi et Leonard Lord examinent une maquette de l'A90 Atlantic.

1952 est une date importante car Morris (à ce moment appelé Nuffield Group) fusionne avec Austin et l’ensemble devient la British Motor Corporation.

Bien que William Morris soit Président de BMC, c’est Lord qui est réellement aux commandes !

Vient alors la décision de rationaliser la production des moteurs et boites de vitesses dans le groupe. C’est ainsi que le moteur série A de l’Austin A 30 équipe désormais la Morris Minor.

Austin et Morris avaient été jusqu’ici les pires ennemis sur leur marché, ceci explique peut-être la raison pour laquelle les deux réseaux restèrent tels quels.

Bien que Leonard Lord le démente, il semblerait que le réseau Austin bénéficiait des meilleurs véhicules au détriment de Morris.

C’est à cette époque qu’Issigonis part chez Alvis. Mais ceci est une autre histoire…

En 1956 la crise de Suez et les rationnements d’essence consécutifs, voient l’apparition des Bubble cars.

Sir Leonard Lord les prend en grippe et déclare : “Nous devons les chasser de la rue en construisant une vrai voiture miniature”.

Lord demande ainsi à Issigonis de revenir travailler chez BMC et lui promet une totale liberté dans le design du projet. Lord, dont la santé se détériore, tiendra sa promesse. Sa seule instruction étant d’utiliser un moteur de la gamme existante pour équiper la Mini. Celui-ci sera bien évidemment le type A.

Ainsi libre de ses choix et contraint par Lord de faire très vite, Issigonis crée la Mini en deux ans alors que la norme de l’époque pour une nouvelle voiture est de 7 ans.

En 1961, âgé de 65 ans, Lord part à la retraite mais reste Président honoraire de BMC et British Leyland jusqu’ à son décès en 1967.

  1. 21/04/2010 à 01:54 | #1

    “epoque pour une nouvelle voiture est de 7 ans” -> j’ai d mal à comprendre là !

  2. admin
    21/04/2010 à 12:55 | #2

    Bonjour,
    pour l’époque, le temps de création d’une nouvelle voiture était de 7 ans (du projet à la production). pour la Mini, Issigonis n’a eu que 2 ans !
    J’espère que ceci est plus clair.
    Merci de votre intérêt et à bientôt !

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